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LITIGE FONCIER A ZIMTENGA DANS LE BAM: Deux camps au bord de l’affrontement

C’est un truisme de dire qu’au Burkina, la situation foncière en milieu rural, malgré l’existence de textes qui la régissent,  se caractérise par de nombreux conflits dont les plus fréquents sont ceux qui opposent les éleveurs aux agriculteurs. Malgré cette situation qui tourne souvent au drame, on a cette fâcheuse impression que les décideurs n’y apportent aucune réponse. Pire, les conflits fonciers sont,  dans la plupart des cas,  entretenus et nourris par ceux qui sont supposés apporter des solutions aux problèmes. Souvent, bien qu’informées de la situation, les autorités ne viennent que pour jouer aux pompiers après que l’affrontement entre les différentes  parties a eu lieu. Nombre de cas d’affrontements entre communautés sont illustratifs de cette réalité. Aussi, bien de cas de conflits fonciers sont en latence depuis des années sans que des garde-fous solides ne puissent être déployés pour empêcher un affrontement.  C’est notamment le cas de la commune rurale de Zimtenga où  des ressortissants des villages de Kaokana et de Roumtenga se disputent le droit d’exploitation de 4 champs. Champs qui ont  été retirés par un camp à l’autre en 2009,  suite à une bagarre entre eux. Pourtant, l’audience publique du tribunal civil et commercial du droit local du Cercle de Kongoussi avait reconnu, le 13 avril 1970, Foungoum Makido, grand-père des expropriés,  comme propriétaire terrien des lieux querellés de nos jours.  L’affaire est de nouveau devant le Tribunal de grande instance (TGI) de Kongoussi.  Ce tribunal,  en pas de caméléon,  se  penche sur le litige sans faire écorcher son image à cause, dit-on,  de son attitude partisane.  Retour donc sur ce conflit foncier vieux de 42 ans.

 

Terre d’Etat, loi des ancêtres ! C’est ainsi qu’on peut résumer la loi sur le foncier au Burkina qui peine à régler définitivement la problématique des terres, notamment dans les zones rurales.  Avril 1970-avril 2012. Voilà 42 ans que le litige foncier oppose les Peulhs de Koakana et une partie des Mossis de Roumtenga dans la commune rurale de Zimtenga, province du Bam. Alors que le litige avait connu un dénouement judiciaire le 13 avril 1970 lors de l’audience publique du tribunal civil et commercial du droit local du Cercle de Kongoussi, voilà qu’il refait surface au Tribunal de grande instance de Kongoussi et ce, depuis 2009. Cette année-là, en effet, une bagarre a éclaté entre  un ressortissant de Kaokona  et  le fils de Mamoudou Sawadogo, chef coutumier de Roumtenga, celui-là même qui a retiré les champs. Le tribunal de grande instance de Kongoussi est saisi de l’affaire et les deux parties sont en attente de comparution.

 

Une vue partielle du champs à l'origine du litige

 

Le  million qui a réveillé le conflit foncier

En 2009, aux alentours des champs litigieux,  éclate une bagarre entre deux hommes. Cette altercation fait des blessés. Ceux-ci sont  admis pour soins au Centre de santé et de promotion sociale (CSPS) de Zimtenga. Quatre personnes de l’autre camp, à savoir  Moussa Sondé, Adama Sondé, Adama Sondé et Assane Dicko,   sont arrêtés et conduits à la Maison d’arrêt de correction de Kongoussi. Ils seront jugés et condamnés à quatre mois de prison ferme. La décision judiciaire rendue le 25 février 2009 au Tribunal de grande instance de Kongoussi sommait aussi les interpellés de verser la somme d’un million de F CFA à Mamadou Sawadogo. Ces derniers sont aussi invités à verser la somme de 100 000 F CFA.  Alors que les ressortissants de Koakana se sont exécutés de la décision judiciaire en payant la somme exigée, Mamadou Sawadogo,  tardant à rentrer en possession de son dû,  conclut que ceux-ci refusent de payer la somme exigée, d’où  sa colère contre ces derniers. Une colère qui l’a poussé à réveiller les démons de la terre en retirant les champs de ces derniers. Champs qu’il estime appartenir à ses aïeuls.

 

Le greffier en chef et le commandant de la brigade de la gendarmerie de Bourzanga en partie responsables

Ces deux personnes n’ont pas eu bonne presse dans cette affaire. Et,  à tort ou à raison, ils sont accusés d’être à l’origine de ce conflit que vivent les habitants de Roumtenga. Lorsque Mamadou Sawadogo a été voir le préfet de Zimtenga en son temps, Saïdou Bikiega,  pour l’informer que les ressortissants de Koakana, des Peulhs,  ne veulent pas payer son argent, quel ne fut l’étonnement du préfet de constater que l’exécution de la justice tardait à se faire. C’est au cours de cet entretien également que Mamadou Sawadogo a informé le préfet de sa décision de retirer les champs aux Peulhs. Alors, sachant ce que pourrait occasionner une telle décision de Mamadou Sawadogo du fait du retard qu’accuse la justice pour rembourser l’argent, le préfet a saisi le greffier en chef,  Me Paul Delwendé Tapsoba, afin qu’il facilite  à Mamadou Sawadogo de rentrer en possession de son argent. En clair, le greffier en chef gardait par devers lui cette somme.  Le commandant de brigade de Bourzanga, lui,  ne trouve pas autre chose que de reprocher au préfet  d’avoir saisi le greffier pour cette affaire.  Alors, le greffier en chef, Me Paul Delwendé Tapsoba, serait à la base de tout ce problème. Ayant perçu l’argent chez les Peuhls, puis chez les Mossis, respectivement les 11 et 12 juin 2009, il aurait sciemment confisqué la somme à son niveau. Selon une source digne de foi, il aura fallu que l’ex-procureur du Faso près le Tribunal de grande instance de Kongoussi, Achille Bonkoungou, tape  du poing sur la table pour que le greffier  s’exécute.
En clair, et à l’analyse, le conflit foncier aura été réanimé par l’attitude incompréhensible du  greffier en chef et du commandant de Brigade de Bourzanga, les deux soutenus par la présidente du tribunal de Kongoussi, Denise Kambou née Bado. Une attitude, à en croire certains, qui frise la cupidité. Et c’est au nom de cette cupidité que l’affaire du foncier a refait surface et que la présidente du tribunal,  au lieu de juger l’affaire,  se plait à  faire tourner en round tout ce beau monde.

 

Quand le tribunal fait de l’affaire un fond de commerce

Le moins qu’on puisse dire est que le tribunal de grande instance de Kongoussi manque du tact pour régler définitivement cette affaire.  Une affaire de foncier, qui, comme nous le disions un peu plus haut, a commencé dans les années 1970 et opposait les défunts Makido Foungan, grand-père des Peulhs,   et Boukary  Sawadogo, père de Mamadou Sawadogo. Le verdict donnait les Peulhs propriétaires fonciers et ceux-ci avaient le droit d’exploiter le terrain qui a une superficie,  selon les estimations, de 2 hectares. Suite à l’audience du 13 avril 1970, les Sawadogo s’adonnaient à des troubles empêchant les Peulhs d’exploiter comme il se doit leurs champs.  Toute chose qui leur (ils étaient au nombre de 6) a valu une condamnation de 6 mois ferme et une amende de 100 000 F CFA.  Depuis lors, les Peulhs exploitaient le terrain jusqu’en 2009 où Mamadou Sawadogo a retiré les champs. C’est ainsi que les Peulhs ont intenté une action en recouvrement de leur droit de propriété au tribunal de Kongoussi. L’affaire aurait été même de nouveau jugé par l’ex-procureur qui a sommé les Mossis de restituer aux Peulhs leurs champs. Mamadou Sawadogo aurait payé 500 000  F CFA pour ses agissements. Tous ces actes de la justice ont été peine perdue et la situation est comme si aucune décision judicaire n’avait été rendue de part le passé.
Au lieu de donner acte  à la décision judiciaire rendue en 1970, le tribunal de Kongoussi n’a eu autre travail à faire que de rouvrir une autre enquête sur ce conflit foncier. Pour cela, la présidente du tribunal de grande instance de Kongoussi a demandé au préfet de Zimtenga et au chef de canton de Dattenga à Zimtenga de lui fournir tous les éléments sur le litige foncier. Le préfet fait appel à ses services compétents,  en l’occurrence des agents des eaux et forêts, de l’élevage, de l’agriculture et de la gendarmerie pour constater le problème sur le terrain. Ces derniers font le constat et déposent leur rapport auprès du préfet ; celui-ci le transmet à la présidente du tribunal. Mais, quel ne fut pas l’étonnement du préfet de se voir notifier par la suite que son rapport est perdu dans les locaux du palais de Kongoussi. Si ce n’est un laxisme de la part d’une justice, c’est qu’il y avait une volonté tacite de ne pas se pencher sérieusement sur le problème. Malgré tout,  le préfet a renvoyé une autre copie de son rapport à la présidente du tribunal.
Quant au chef de canton de Dattenga à Zimtenga, dans son rapport à la présidente du tribunal datant du 21 décembre 2009 auquel nous avons eu accès, il notifie ceci : « Pour ce qui concerne le problème entre les éleveurs et ceux de la localité de Roumtenga, j’estime que ce sont les éleveurs qui doivent exploiter le terrain ». En effet, a-t-il poursuivi dans son rapport, « ils (ndlr : les éleveurs) exploitent le terrain depuis plusieurs décennies et c’est seulement après la bagarre entre ceux de Roumtenga et les éleveurs que les Mossis ont décidé d’occuper les champs ». Alors, avec autant de déclarations et de témoignages, la justice durant les trois ans,  se contentera de rester dans une situation aphone, faisant croire à bon nombre de personnes qu’il y a anguise sous roche dans ce litige foncier.  

 

L’Elysée de dame corruption aurait soufflé sur la justice

A la lumière des événements et des déclarations des uns et des autres, nous sommes fondés à croire que le conflit foncier est devenu un fond de commerce pour certaines personnes au Tribunal de grande instance de Kongoussi. Depuis que le tribunal s’est rendu compte qu’il peut facilement faire payer à des pauvres paysans la somme d’un million de franc CFA pour une affaire de bagarre,  il ne cesse de tirer le litige foncier pour en profiter davantage. Alors que pendant ce temps, les protagonistes se regardent en chiens de faïence et sont au bord de l’affrontement. Cela n’inquiète visiblement pas les animateurs du palais de Kongoussi qui ont une mauvaise réputation dans la zone. Nous avons ouï dire qu’un jeune,  dont nous tairons volontairement le nom,  dans le village de Roumtenga,  chante sur tous les toits que les Mossis ont acheté l’affaire au tribunal. Il aurait déclaré,  qu’après avoir eu assez d’or à Zimtenga, il aurait versé une forte somme à certaines personnes au tribunal. Aussi, nous dit-on, l’adjoint du commandant de brigade de la gendarmerie devenu aujourd’hui commandant de brigade de la gendarmerie avait mailles à partir avec l’ex-commandant de brigade de la gendarmerie de Bourzanga, aujourd’hui en poste à Karangasso Vigué parce qu’il n’appréciait pas les attitudes peu orthodoxes de son ex-chef dans cette l’affaire.

Par Yaya Issouf MIDJA









27/04/2012
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