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VENTE LITIGIEUSE DE PARCELLE DE OUAGADOUGOU: Une famille mise à la rue manu militari

Dans la matinée du mercredi 26 septembre 2012, les habitants du secteur 6 (ex-secteur 8) de Ouagadougou ont eu droit à un spectacle assez affligeant. En effet, une famille, sur décision de justice, a été mise à la rue manu militari. Comment en est-on arrivé là ? A en croire, le chef de la famille Compaoré, puisque c’est d’elle qu’il s’agit, leur malheur est dû à une combine orchestrée par leurs tantes. Depuis le mercredi 26 septembre 2012, la famille Compaoré résidant au secteur 6 (ex-secteur 8) de Ouagadougou ne sait plus à quel saint se vouer, ou plutôt, où crécher. Meubles et autres effets abandonnés sur la rue, murs mis à terre par le Bulldozer qui faisait allègrement sa besogne, ouvriers occupés à décoiffer les toits de certaines maisons. Tel est le spectacle qui a été donné à voir. Pendant que les badauds, à quelques mètres de l’habitation de la famille Compaoré s’interrogeaient sur la raison de cette agitation, le huissier et son assistant au pied d’un immeuble et éléments de la compagnie républicaine de sécurité (CRS) veillaient à ce que la décision de justice dont ils sont les exécutants soit scrupuleusement respectée à la lettre, sous le regard impuissant et désabusé des membres de la famille qui, retranchée dans un coin de la cour, assistaient à la démolition de leurs habitations. Arrivés sur les lieux nous avons approché l’huissier pour savoir ce qui se passait. Il nous fait comprendre qu’il n’avait pas le temps de nous répondre parce qu’il était en plein exercice. Après plus d’une heure d’attente et après quelques tentatives d’arracher quelques réponses à nos questions, nous nous somme rendus compte qu’en fait, notre interlocuteur ne souhaitait pas avoir affaire à nous puisse qu’il va s’embarquer quelques temps après dans le véhicule avec les éléments de la CRS en nous faisant savoir tout simplement qu’il est venu exécuter une décision de justice. Nous nous sommes décidés donc d’entrer dans ce qui restait comme cour à l’infortunée famille. Le chef de la famille, Joseph Ignace Compaoré accepte de se prêter à nos questions et nous fait la genèse de son infortune.

C’est dans la rue que les effets de la famille ont été entreposés

 

A en croire Joseph Ignace Compaoré, c’est un différend entre ses tantes et la famille qui a conduit à leur malheur. « Je suis dans la cour depuis 1963. C’est la cour de ma grand-mère. Après le décès de notre grand-père, la vieille était obligée de venir acheter la cour pour pouvoir s’occuper de nous avec sa fille cadette, ma mère. Depuis donc 1963, nous sommes dans la cour, en 1969, la grand-mère m’a remis le permis urbain pour que j’intervertisse les noms pour porter le mien. Elle m’a dit que normalement la parcelle ne devait pas me revenir, mais plutôt à mon grand-frère. Mais compte tenue que ton grand-père avait laissé une parcelle à Saint Léon, mon grand-frère allé garder cette parcelle. Il faut dire qu’à l’époque, une femme ne pouvait pas avoir son nom sur un permis urbain d’habiter et c’est pour cette raison qu’elle m’a remis les papiers de la cour pour que je change le nom pour mettre le mien. J’ai donc gardé sur moi les papiers, car en son temps, je n’avais que 14 ans, je n’avais pas l’âge requis pour faire un permis urbain d’habiter et depuis, les choses sont restées en l’état. Le 6 août 1988, la grand-mère est décédée et nous avons fait son certificat de décès, le conseil de famille, le certificat d’hérédité et nous avons partagé ses biens. Maintenant, compte tenu du fait qu’elle avait acheté cette parcelle, et qu’elle savait qu’elle avait trois filles, elle a acheté deux autres parcelles pour l’aînée et la benjamine et pour ma mère qui était la cadette, elle m’a remis cette parcelle parce qu’elle ne voulait pas qu’il y ait un problème après son décès. Comme ça, chacun avait sa parcelle et il n’y avait pas de problème. Mes tantes et moi vivions en parfaite harmonie », nous a-t-il relaté avec désarroi. Le début du calvaire de la famille Compaoré Selon lui, son calvaire et celui de sa famille a commencé après le décès de sa mère. « Après le décès de ma mère le 20 avril 2004, mes tantes m’ont demandé si j’avais fait la mutation de nom sur le PUH. J’ai répondu non, car je considérais qu’il n’y avait pas nécessité, car il n’y avait pas de problème surtout que chacune d’entre elles avait sa parcelle. En fait, c’était un piège et moi je ne le savais pas. Je les considérais comme mes tantes et j’avais confiance en elles. En 2007, j’étais assis et on est venu me tendre une convocation pour que je vienne répondre à la justice. Lorsque je m’y suis rendu, on m’a fait comprendre que mes tantes sont venues faire une demande de propriété parce que leur mère est décédée en laissant une parcelle et qu’elles étaient les seules héritières de ma grand-mère. Alors qu’en réalité, elles étaient trois, puisqu’il y a aussi ma mère », nous a-t-il expliqué. Une affaire qui sent du faux en écritures De l’avis de Joseph Ignace Compaoré, la parcelle a été vendue sur la base de faux documents, car a-t-il fait savoir, il est en possession du vrai permis urbain d’habiter et du procès verbal authentique du conseil de famille. « Les documents qui ont servi à la vente de la parcelle sont faux, car sur leur certificat d’hérédité, elles ont mentionné que la grand-mère est décédée en 1987 alors qu’elle est décédée en 1988. Donc j’ai considéré leur certificat comme faux et effectivement à l’époque, on nous avait renvoyé avec le dossier, car il y avait faux en écritures et on ne pouvait pas leur établir un titre de propriété. Ensuite, on m’a convoqué une fois de plus, pour me faire savoir que mes tantes sont revenues à la charge et qu’il fallait qu’on vende la parcelle, je me suis opposé à cela, car on ne peut pas vendre la parcelle parce que c’était la parcelle de ma mère et que chacune d’elles avait sa parcelle. Ainsi, on a fait appel aux parents de la grand-mère pour qu’ils puissent témoigner et je pensais que l’histoire était terminée et la justice ne pouvait pas trancher en leur faveur. La vieille est décédée en 1988 et elles disent qu’elle est décédée en 1989 sur le procès verbal du conseil de famille qu’elles ont présenté, c’est seulement leurs noms qui y figurent comme si ma mère n’existait pas », a-t-il raconté. Joseph Ignace Compaoré n’arrive donc pas à comprendre qu’on puisse l’obliger à vendre sa cour. Cela d’autant plus que sur le certificat d’hérédité authentique, il est l’héritier à part entière. « Je ne peux pas comprendre qu’aujourd’hui on leur donne le droit de venir vendre la parcelle et partager l’argent entre elles et mes demi-frères et venir me tendre seulement un million 300 mille francs CFA pour que je quitte une parcelle sur laquelle j’ai investi depuis 1963 », s’est-il offusqué. Pour lui, la logique voudrait que même s’il y a vente, qu’on puisse le dédommager parce qu’il estime qu’il a investi dans la parcelle, « 42 ans de sueur, ce n’est pas rien », s’est-il indigné. De plus, notre interlocuteur nous fait savoir que l’estimation de ses investissements dans la cour a été sous-évaluée. Au regard de la tournure que prenait les évènements, a-t-il expliqué, il s’est décidé à adresser une lettre au procureur le 28 mars 2012 pour porter plainte, mais malheureusement jusqu’au jour d’aujourd’hui il n’a pas eu de suite. Entre-temps, le nouvel acquéreur décide de mettre en valeur sa parcelle, ce sera une fois de plus le ballet de l’huissier et de sommations en sommations, l’infortuné père de famille est convoqué chez le juge Nadine Bambara où il a fait comprendre que c’était sur la base de faux papiers que la parcelle lui a été vendue. Toutefois, le verdict est sans appel, il faut simplement que Joseph Ignace Compaoré et sa famille libèrent la parcelle. Chose que ces derniers n’entendent pas faire de sitôt. Après avoir reçu maintes sommations de déguerpir et pendant que, Joseph Ignace Compaoré attendait une réponse du procureur, il a la désagréable surprise de voir débarquer l’huissier et les forces de sécurité pour décoiffer les maisonnettes. En se rendant à la gendarmerie pour comprendre ce qui se passait, car selon lui, l’affaire était toujours en cours au niveau du parquet, il est informé que son dossier a été transmis à un juge nommé Bonkoungou et depuis lors, il n’a pas de nouvelle du juge. A en croire Joseph Ignace Compaoré, il y a comme un parfum de corruption autour de son affaire, car il n’arrive pas à comprendre qu’il ait porté plainte depuis mars et que la plainte de l’acquéreur portée en mai ait trouvé écho favorable. Alors, comme dernier recours, Joseph Ignace Compaoré demande l’intervention du procureur afin qu’il puisse au moins percevoir ses droits au regard des investissements faits sur la parcelle, « si j’ai mes droits, je me cherche une autre maison. A cause de cette histoire ma femme est décédée », s’est-il résigné à nous lâcher. Agent retraité de la SONABEL, Joseph Ignace Compaoré dit ne plus savoir à quel saint se vouer ni où aller avec les 12 membres de sa famille. Pour l’heure, la famille est décidée à rester sur les ruines. « Je n’ai nulle part où aller » nous a martelé Joseph Ignace Compaoré avec un long soupir qui traduit sa grande amertume.

 

Par G. Maurice BELEMNABA



28/09/2012
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