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SITA SANGARE, PRESIDENT DE LA FBF: « Nous sommes vice-champions d’Afrique et nous devons prouver que cela n’est pas le fait du hasard. »

C’est dans son bureau, non pas celui de la direction technique nationale, à Ouaga 2 000, mais bien celui de la justice militaire que nous avons rencontré le président de la Fédération burkinabè de football, le colonel Sita Sangaré, peu avant 13 heures, le lundi 25 août dernier. Comme il fallait s’y attendre, l’homme était dans sa traditionnelle tenue de fonction militaire, avec ses barrettes flanquées sur les épaules. Sur son bureau, une pile de documents d’un peu plus de 5 centimètres de hauteur. C’est dans cette ambiance que nous avons échangé avec le premier responsable du football burkinabè sur les sujets « brûlants » du moment. La subvention des clubs de l’élite, les problèmes rencontrés en D2, le paiement des salaires des joueurs de D1 par le ministère des Sports et des Loirirs,  et son impact sur le football local, les éliminatoires e la CAN 2015, les adversaires du Burkina et les chances des Etalons, l’élimination précoces des Etalons U17 et U20, la candidature du Burkina aux prochaines CAN, la violence dans les stades algériens, le probable retour de Moumouni  Dagano dans le groupe Etalon… Toutes ces questions ont été abordées, sans langue de bois, avec le président du comité exécutif de la FBF.

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Le Quotidien : La saison sportive au niveau de la Fédération burkinabè de football tire vers sa fin. Quel bilan faites-vous de cette saison 2013-2014 qui s’achève ?

Sita Sangaré, président de la FBF : Je voudrais d’abord dire que la saison sportive au niveau du football n’est pas en tant que tel achevée. C’est au niveau de l’élite, c’est-à-dire le championnat de D1 et D2 que c’est fini. Mais, il y a encore le championnat féminin qui va démarrer le 28 (septembre, ndlr) et encore le championnat des petites catégories que nous allons entamer. Avec ça, nous allons achever notre saison. Mais je dois d’ores et déjà dire qu’en ce qui concerne les championnats qui sont terminés, nous tirons un bilan globalement satisfaisant.

Le vendredi 15 août dernier, la Fédération a organisé la nuit des lauréats qui consiste à récompenser les meilleurs acteurs de la saison. Pouvez-vous nous parlez de cette initiative et des objectifs visés ?

Il faut d’abord dire que c’est une manifestation qui se tenait de par le passé. Mais malheureusement, depuis le retrait « des cigarettiers » du sponsoring au Burkina Faso, cela s’était arrêté. Nous avons estimé, au niveau du comité exécutif, que c’était une bonne initiative et qu’il fallait la restituer. C’est ainsi que, malgré les difficultés, nous avons tenu à insérer cela dans le règlement, tant du championnat de D1 que celui de D2, pour pouvoir, après une année de dure de labeur, se retrouver autour d’une soirée festive avec les différents acteurs et leur témoigner toute notre reconnaissance.

Combien est-ce que cette cérémonie a coûté ?

Je n’ai pas les chiffres exacts. Mais, je pense que le montant n’a pas vraiment d’importance parce que pour nous, il était important de pouvoir le faire. Ça se chiffre aux alentours d’une trentaine de millions F CFA. Mais, je pense que c’était très normal. Et dans l’avenir, nous veillerons à ce que cette manifestation puisse se tenir et se pérenniser.

Cette cérémonie est entrée en hibernation avant de resurgir en 2014, pour les raisons que vous avez évoquées. Pouvez-vous alors rassurer les acteurs du football que cette fois sera la bonne ?

C’est un engagement que nous avons pris et c’est marqué. C’est pour cela d’ailleurs que j’ai été surpris que certains de vos confrères aient dit que la fédération a voulu défier la pluie. Non, il faut savoir que c’est quelque chose qui existe. Et une fois que cela est inséré dans le règlement du championnat,  on doit le tenir. C’est une obligation. La période n’a aucune espèce d’importance. Vous savez que la saison a pris fin et les clubs s’attendent à recevoir leurs récompenses. On ne va donc pas différer cela indéfiniment. C’était plus que nécessaire de tenir la manifestation. Je prends l’engagement que nous continuerons à tenir cette manifestation, dans les années à venir.

Lors de cette même manifestation, vous avez annoncé que la subvention passait de 5 millions à 7 millions de F CFA. Alors qu’au niveau  des dirigeants de clubs, on s’attendait à ce qu’on passe du simple au double.

Il ne faut pas que les gens rêvent. Il faut simplement dire que quand nous sommes arrivés à la Fédération, c’était 2 millions de F CFA. Ces dirigeants qui disent cela étaient où ? En combien d’années d’indépendance du Burkina Faso, on était à 2 millions de F CFA ? Il faut d’abord se féliciter qu’on ait pu dégager des moyens. Il faut être honnête dans ce pays. Donc l’argent ne se ramasse pas au coin de la rue. Nous faisons des efforts parce que nous-mêmes, nous étions président de club. Nous savons les difficultés que les clubs traversent et nous avons toujours dit que ce n’est pas normal qu’on ne donne que des miettes aux clubs. Nous sommes conscients que jusqu’à présent, ce n’est pas suffisant. Nous nous battons comme nous pouvons pour pouvoir rehausser la subvention. Mais, il ne faut pas se mentir et croire qu’on peut doubler cela. Personne au niveau du comité exécutif n’a pris l’engagement de doubler ce montant. Nous avons dit que nous allons nous battre pour que d’ici à la fin du mandat, nous puissions arriver à un minimum de 10 millions de F CFA. A l’AG extraordinaire qui s’est tenue, nous avons dit aux clubs que nous allons passer à 7 500 000 F CFA pour que l’année prochaine, on arrive à 10 millions de F CFA. Donc, ce dirigeant de club qui vous a dit cela est foncièrement malhonnête parce que tous les dirigeants savent que l’engagement que nous avons pris, c’était de pouvoir relever doucement pour atteindre le montant de 10 millions de F CFA. Ce n’est même pas possible. Où allons-nous trouver, tout de suite, 5 millions de F CFA pour doubler la subvention. Il ne faut pas être démagogue.

A la Fédération, nous faisons la politique de nos moyens. Nous approchons et il y a de bonnes volontés qui nous accompagnent. Nous essayons d’aller dans ce sens.

Pourtant, dans certains milieux, on entend dire qu’avec tous les sponsors que la Fédération mobilise depuis un certain temps, on aurait pu doubler cette subvention.  

Oui ! mais où est-ce que les gens étaient avant pour mobiliser ces sponsors. Ce n’est pas la peine de se mettre à raconter sa vie. Nous travaillons de façon assez transparente. Il ne faut pas décourager les bonnes volontés. Nos comptes sont très clairement tenus. Je dois d’ailleurs rappeler que lorsqu’on crée un club, ce n’est pas pour attendre que d’autres personnes vous donnent des subventions. Si vous suivez bien l’exemple de la France où la DNCG (Direction nationale de contrôle et de gestion, Ndlr) rétrograde des clubs en  division inférieure parce que ces clubs-là n’ont pas de compte équilibré… Je pense  que peut être cela aussi va arriver au Burkina Faso ici. On crée un club parce qu’on est sûr d’avoir les moyens de le gérer. Maintenant, ce que la Fédération donne comme accompagnement,  c’est quelque chose. Nous sommes conscients qu’il faut faire un effort pour ces gens. Il ne faut pas non plus croire que c’est la Fédération qui va gérer les clubs à la place des dirigeants qui sont là. Il faut que cela soit très clair. Ceci dit, aucune fédération au Burkina n’a fait les efforts que nous avons faits. Nous en sommes légitimement fiers. Maintenant, il ne faut pas se mettre à crier comme si c’était un crime d’avoir pu démarcher tel ou tel sponsor. Toute autre personne aurait pu et dû le faire. Nous le faisons en toute responsabilité, il faut nous laisser le temps de travailler à notre rythme. Nous savons ce que nous faisons, nous avons des engagements auprès des partenaires  qui nous soutiennent. Ce n’est pas sûr que les sponsors aient donné ces moyens-là pour qu’on les donne aux clubs. Nous savons… ça va très bien. Nous rendons compte à ces sponsors et cela est suffisant.

En D2, il y a eu beaucoup de problèmes concernant la montée en D1, avec une histoire de matches arrangés. Finalement, il a été décidé d’un match de barrage entre Canon du Sud et ASEC de Koudougou. Quel est votre appréciation ?

Non, je n’y vois pas de problème. Ce sont peut-être des esprits malins qui cherchent des problèmes là où il n’y en a pas. C’est juste une application des textes. Et c’est tout à fait normal. Le football est un monde de passion et tant que tel, la question des réserves, des appels est réglée par nos textes. Les textes sont très clairs. S’il y a une rencontre et qu’il y a des désaccords, on peut formuler des réserves. Mais, ce n’est pas parce que vous avez formulé une réserve qu’automatiquement, vous avez raison. Il y a des structures habilitées pour trancher ;   et je me réjouis que les instances habilitées, à différents niveaux, aient traité en toute responsabilité ces questions. Maintenant, c’est comme en matière de justice. Lorsque deux personnes pensent avoir raison, forcément que l’une des parties peut ne pas être contente du traitement réservé au dossier. Mais, cela ne veut pas dire qu’on ne devrait pas faire ainsi.  Il  y a des structures qui ont tranché et nous nous en tenons en cela.

N’aurait-il pas fallu rétrograder ces équipes pour dissuader les autres ?

Quand on dit qu’il y a une suspicion sur deux rencontres, cela implique 4 équipes. Encore une fois, je dis qu’il faut bien lire nos textes. L’article 32 du règlement du championnat de D2 est très                 clair. Il dit que « s’il est établi qu’il y a arrangement entre équipes, on applique des sanctions qui vont des amendes à la rétrogradation ». Mais, il faut que ce soit établi. Celui qui a la preuve formelle d’un arrangement, la Fédération est disposée à l’écouter. Il n’y avait que des présomptions et c’est sur la base de la présomption que la ligue nationale avait cru bon de prendre des sanctions. Mais, elle-même avait été prudente parce qu’elle était consciente que  les faits n’étaient pas suffisamment établis. Mais, elle s’était dit qu’il y avait des présomptions fortes. Malheureusement, encore une fois, le texte est très clair et dit qu’il faut que les faits soient établis. Comme les faits n’étaient pas établis, on ne peut pas tirer un quelconque avantage des   dispositions de l’article 32 pour dire qu’il faut rétrograder. Vous savez, la rétrogradation est une mesure extrême qui ne peut s’appliquer que lorsqu’on est sûr, à cent pour cent, d’avoir les preuves. Donc, les faits n’étant pas établis, on ne peut simplement pas procéder à une quelconque rétrogradation de qui que ce soit. C’est aussi simple que cela. Il faut souvent faire l’effort d’aller au-delà des passions pour regarder nos textes et voir ce que ces textes disent.

Lors de la nuit du mérite, le premier responsable du département en  charge des sports a annoncé que les 20 joueurs des 16 équipes prenant part au championnat de D1 émargeront au ministère des Sports et des Loisirs. Comment cela va se faire concrètement ?

Il faut poser la question au premier responsable du département des Sports. Nous avons toujours dit que nos athlètes évoluent dans un contexte assez difficile  et il vous est loisible de le constater. Si dans certains clubs les gens se débrouillent pour donner des salaires, il faut dire que les salaires n’arrivent pas toujours au bon moment. Quand très souvent ce n’est même pas rejeté  aux calendes grecques. Il y a des footballeurs qui n’ont pratiquement pas de salaires. Or aujourd’hui, au niveau de l’élite dans tous les pays, on tend vers la professionnalisation. Le football est devenu un métier pour de nombreux jeunes dans notre pays.  Il faut bien sûr, pour tout métier lorsqu’on accomplit une mission, avoir un salaire. Ce problème avait déjà été posé depuis belle lurette et nous essayons de trouver des solutions. Pour ma part, je me réjouis qu’on ait pu arriver à une situation de ce genre. Une fois que la  mesure sera officiellement arrêter, ce n’est pas non plus de l’argent qui sera remis aux dirigeants de clubs. Ce sont des listes bien arrêtées qui seront transmises. Et les joueurs iront émarger au ministère des Sports parce qu’on veut s’assurer qu’effectivement ils ont un salaire garanti. Voilà ce que je peux dire, en attendant que des voix plus autorisées se prononcent.

En tant que premier responsable du football burkinabè, quel impact   cette mesure peut avoir sur la qualité de notre championnat ?     

Il est évident que cela va avoir un impact qualitatif sur notre football. Je dois rappeler que ce n’est pas une nouveauté. Ça sera une nouveauté au Burkina Faso, mais des pays l’on déjà expérimenté. Je ne prendrai que les exemples respectifs   du Gabon, de la Côte d’Ivoire et du Congo Brazzaville. Le Congo Brazzaville, pour compter de cette année, est rentré dans cette dynamique pour pouvoir donner quelque chose aux athlètes. Avec cette manne, si on est sûr que les joueurs sont payés, que les dirigeants n’ont pas la contrainte de payer, c’est un plus. Quel que soit le montant, parce que je sais que le montant n’est pas encore arrêté, car nous sommes toujours en discussions. Mais, quel que soit le salaire qui sera donné, il est sûr que nous avons des clubs ici qui peuvent payer au-delà. C’est donc juste un appoint pour aider ces clubs-là. Si la masse salariale  est réduite  au niveau des clubs, nous sommes convaincus cela permettra à ces clubs d’avoir d’abord des joueurs de qualité. Si nous avons des joueurs de qualité, on peut légitimement s’attendre à ce que le niveau de notre championnat soit tiré vers le haut. Parce que si on aide déjà les clubs à payer leurs joueurs, je pense qu’ils auront certainement un peu plus de marge de manœuvre  pour faire venir des talents rares au niveau de nos différents clubs qui vont animer notre championnat national.

Les joueurs étrangers sont-ils concernés par cette mesure ?

En tout état de cause, c’est une mesure qui est en discussion, au niveau du ministère des Sports et des Loisirs. Nous allons voir. Comme je l’ai déjà dit plus haut, ce n’est qu’une mesure d’appoint.  Cette mesure consiste à aider les clubs dans la gestion de leur masse salariale. Maintenant, même si les étrangers ne sont pas concernés, les clubs dégagerons nécessairement des ressources parce ce sont des ressources additionnelles. Ils auront donc plus de marge de manœuvre pour pouvoir recruter des talents rares à l‘étranger.

Au niveau de certains clubs, on s’inquiète de cette mesure qui pourrait avoir un impact sur la subvention à eux allouée par la FBF.

Je ne vois pas du tout le rapport. Il s’inquiète par rapport à quoi ? Je vous ai dit que c’est encore une fois le problème de l’assistanat au Burkina Faso. Les gens ne sont  pas du tout honnêtes et ça, on peut le constater. On veut vous aider, vous ne connaissez même pas les tenants et les aboutissants et vous dites que vous allez…

J’ai dit plus haut par combien nous avons multiplié la subvention en si peu de temps. Les clubs doivent savoir qu’il leur appartient de se battre, tout comme la Fédération se bat pour trouver les moyens. J’ai même entendu une fois des gens dire que la Fédération va vers les sponsors vers qui les clubs  devaient aller. Mais, où ces gens étaient avant que la Fédération n’aille les voir ? Ces mêmes sponsors étaient là. Qu’est-ce qui les empêchait d’aller vers ces sponsors ?   C’est trop facile ! Peut-être que les gens ne sont pas suffisamment outillés pour aller rechercher des partenariats. Il faut que les clubs se tournent résolument vers des voies de recherche de moyens de financement, au lieu de continuellement tout attendre des structures dirigeantes, que ce soit de l’Etat ou de la Fédération. En réalité, c’est ça la plaie de notre football. Il faut chercher les moyens. En tout état de cause, la Fédération a suffisamment fait en matière de recherche de moyens. Seuls les esprits foncièrement malhonnêtes peuvent dire le contraire parce que ce sont les faits qui parlent. Les fameuses subventions ont été plus que multiplier.

Sans vous couper la parole, vous confirmer que cette mesure n’aura aucun impact sur les 7,5 millions de subvention ?

Mais, il est évident que cela n’aura aucun impact. Je ne vois pas le rapport. C’est une décision qui a été prise à un très haut niveau pour venir en appoint aux clubs. Maintenant, il ne faut pas croire qu’on va continuer à l’augmenter par ci, par là. Non ! Je dis que la vraie solution,  c’est que les clubs accroissent leurs capacités de recherche de subventions. C’est vraiment très important. Il ne faut pas se cacher. Nous avons tendance à évoluer vers le professionnalisme et à ce niveau, seuls les clubs solvables seront admis à évoluer dans l’élite. On ne pourra plus continuer à admettre des gens pour qu’ils attendent tout de la Fédération et de l’Etat du Burkina Faso. Cela n’est pas possible. On vient dans                                                                                          l’élite parce qu’on peut y évoluer. Il faut vraiment chercher les moyens pour y évoluer.

Le Burkina joue le Lesotho le 6 septembre, dans le cadre de la première journée des éliminatoires de la CAN 2015. Un mot sur cet adversaire.

Aujourd’hui, tous les adversaires se valent. Je dis toujours qu’au football, le ballon est rond pour tout le monde. Autant le Burkina se bat pour pouvoir se qualifier pour la prochaine Coupe d’Afrique des nations, autant, il ne faut pas se faire d’illusions. Toutes les autres nations qui ont atteint ce stade de la compétition veulent arriver à la phase finale. Donc, il n’y a pas de petites équipes. Le Lesotho est pour nous un adversaire de taille et, nous devons nous préparer en conséquence. Depuis un certain temps, je me réjouis que le staff technique ait pris le problème à bras le corps.

Justement, avec la situation assez compliquée des internationaux burkinabè en clubs qui a même pousser d’autres à s’exiler dans des championnats de niveau inférieur, y a-t-il une raison de s’inquiéter ? Surtout que le Lesotho a affiché une certaine sérénité, lors des préliminaires ?

Je voudrais inviter nos partenaires de la presse à relayer les bonnes informations parce que la presse doit aider. Prenons le cas de Pitroïpa. Je vois que vous faites un peu allusion à lui. Il a quitté le championnat de France pour aller aux Emirats arabes unis. En quoi on peut dire que ce championnat n’est pas relevé. Prenez une équipe comme le Ghana lors de sa participation à la dernière Coupe du monde. L’un des meilleurs éléments du Ghana s’appelait simplement Assomoah Gyan qui évolue aux Emirats arabes unis, là où Pitroïpa est parti. Ça ne veut absolument rien dire. Le championnat des Emirats arabes unis attire aujourd’hui de grands noms du football mondial. Il n’y a pas de problème dans cela.  En tant que président de la Fédération (burkinabè de football, ndlr), je me réjouis plutôt que Pitroïpa ait pu quitter Rennes où il n’avait pas suffisamment de temps de jeu pour aller dans un club où il a un statut de star et où il va jouer régulièrement. Seule la compétition est importante. Donc là, je n’ai pas de problème. Ce qu’il faut savoir, c’est que le monde du football est ainsi fait. Nous sommes dans la période du mercato actuellement en France. Cette période va se clôturer le 31 août et c’est normal qu’il y ait des débats. Je reviens d’une tournée en Europe où j’ai pu aller voir quelqu’un comme Alain Traoré à Lorient. Il y a des choses que les journalistes savent qu’ils doivent donner comme information au grand public qui ne connait pas forcément les subtilités de ce milieu.

Alain Traoré est l’un des plus gros salaires de Lorient. Il est évident qu’avec les difficultés qui existent d’ailleurs un peu partout sur le plan mondial… la France également traine ses difficultés qui amènent les dirigeants à vouloir réduire leur masse salariale et donc à pousser  les gros salaires vers la sortie. C’est aussi simple que cela. Ce n’est pas compliqué. Donc, ce qui est certain, actuellement Alain Traoré, pour ne parler que de lui, est l’un des gros salaires du club. Le club veut le pousser vers la sortie pour alléger sa masse salariale. On lui a fait des propositions. Il lui reste encore deux ans de contrat à Lorient et on ne peut pas le forcer à partir. Ce que je peux donner comme information, c’est qu’il s’entraine avec le groupe pro de Lorient. Il n’y a pas de problème. Il est dans un état de forme et je pense qu’il donne rendez-vous à tout le public sportif dès le 6 septembre. Vous aurez la latitude de le constater. Très sincèrement de mon point de vue, la presse sportive du Burkina à un rôle très important d’accompagnement vis-à-vis de nos cadres parce que, je le dis avec beaucoup de conviction, beaucoup de pays traversent, en réalité, cette même situation. Mais, on ne s’étale pas trop là-dessus parce que l’essentiel, c’est l’état de forme. Nous avons un entraineur en qui nous avons confiance et qui regarde l’état de forme des joueurs pour composer la meilleure sélection possible. Nous avons des cadres et nous nous sommes rassurés qu’il n’y a pas péril en la demeure. Nos cadres jouent. Ceux qui ne jouent pas, on peut avoir l’assurance qu’ils s’entrainent avec le groupe pro. S’ils ne sont pas dans l’équipe première pour les compétitions, c’est compte tenu de la masse salariale et les clubs sont en train de faire pression pour pouvoir les céder à d’autres clubs. Bien sûr, lorsqu’ils les cèdent, ils escomptent avoir également quelque chose pour renflouer leurs caisses. Mais, cela n’affecte ni le moral, ni le potentiel de nos principaux joueurs.

Peut-on alors s’attendre à un retour de Moumouni Dagano dans l’équipe qui disputera les éliminatoires ?

Je pense que la porte de la sélection nationale n’est fermée à personne, encore moins à un cadre comme Moumouni Dagano qui, je dois le rappeler, est le meilleur buteur de l’histoire de nos sélections nationales (avec 31 buts, Ndlr). Il n’y a pas péril en la demeure. Si l’entraineur national lui fait appel, demain il sera là. Et je pense que Moumouni Dagano est, lui-même, au courant de cette donne. Je pense qu’il n’y a pas de problème.

Mis à part le Lesotho, d’autres adversaires que le Burkina connait assez bien se dresseront sur son chemin, à savoir le Gabon et l’Angola qui sont des équipes difficiles à manœuvrer. Du côté de la Fédération, crois-t-on à une qualification ?

Si on n’y croyait pas, ce n’était même pas la peine de s’engager. A partir du moment où on s’est engagé, c’est qu’on pense comme toutes les autres nations qu’on a notre place pour le Maroc. En tout cas, nous nous battons pour cela. Je dois rappeler, en tout état de cause, que nous avons un challenge, un défi à relever. Nous sommes vice-champions d’Afrique et nous devons prouver que cela n’est pas le fait du hasard. Je pense qu’aussi bien les garçons que le staff technique ont pleinement conscience de l’enjeu. Tout est mis en œuvre pour que, en tout cas, le peuple du Burkina puisse continuer à être fier de son équipe nationale.

Vice-champion en 2013, peut-on dire que l’objectif visé en 2015, c’est le titre ?

Nous ne nous disons pas cela. Nous sommes dans un domaine de compétition. Nous prenons les matches comme ils arrivent. Nous disons seulement que nous devons d’abord nous qualifier pour les phases finales. Lorsque nous allons nous qualifier, nous allons sans doute élaborer un nouveau calendrier et nous verrons quels sont les objectifs que nous pourrons essayer d’atteindre.

Vous avez été au Brésil lors de la Coupe du monde, qu’avez-vous ressenti, sachant que le Burkina aurait pu être de la fête ?

Je pense que nous aurions pu y être. Je le répète, nous avons été éliminés dans des conditions difficiles à accepter. Même si cela est derrière nous, nous pensons que c’était une opportunité pour le Burkina Faso de participer à cette grande fête du football mondial parce que c’est le plus grand événement footballistique qui existe. Nous allons tirer tous les enseignements pour que, pour la prochaine Coupe du monde Russie 2018 s’il plait à Dieu, on puisse y être pour participer, aux côtés des autres nations, à cette belle fête sportive et prouver également que le football au Burkina Faso est en progrès.

Depuis le sacre des cadets en 2011 et 2007 pour les juniors, le Burkina n’a plus participé à une phase finale de CAN U17 ou U20. Comment l’expliquez-vous ?

Vous pourrez tous remarquer qu’en la matière, on n’a vraiment une bonne politique de relève. Depuis notre arrivée à la tête du comité exécutif, nous menons la réflexion. Nous avons dit qu’il faut déjà instaurer un championnat des petites catégories. Nous y sommes. L’année dernière, nous l’avons organisé.  Cette année, comme je le disais tantôt, nous allons le faire. A l’époque, lorsque nous avons remporté la coupe d’Afrique, il faut dire que tous les succès des petites catégories au Burkina reposaient essentiellement sur le travail accompli au niveau du centre de formation Planète champion. D’ailleurs les principaux cadres de notre équipe nationale aujourd’hui sont issus de Planète champion. Depuis que Planète champion a mis la clé sous le paillasson, ce n’est pas évident. C’est pourquoi nous encourageons les gens à la création des centres de formation. C’est à ce niveau que les enfants, dès le bas âge, apprennent les fondamentaux du football. Comme ça, couplé à un bon championnat des petites catégories, nous pensons que nous pourrons avoir à l’avenir de bonnes équipes en petites catégories qui pourront nous aider. Sinon, les résultats acquis sont essentiellement, et il faut le reconnaitre, du mérite de Planète champion et d’autres centres de formation. Maintenant, nous allons progressivement travailler à restructurer ce monde des centres de formation et bien élaborer, bien bâtir, notre championnat des petites catégories. Nous pensons que de cette manière, nous pourront compétir sainement au niveau des petites catégories.

Ne pourrait-on pas mettre ces contre-performances sur la capacité des entraineurs à qui l’on confie les petites catégories, ou encore le mode de sélection de joueurs ? En 2011, quand le Burkina devenait champion d’Afrique, Planète champion était déjà fermé.

Planète champion était peut- être déjà fermé. Mais, il y avait les acquis, c'est-à-dire les jeunes qui avaient été formés par Planète champion. Je trouve que votre question  est vraiment pertinente. Dans tous les cas, au niveau de la Fédération, nous avons promis d’y réfléchir. Nous avons mis tout sur la table. Nous sommes en train de regarder quels sont les voies et moyens pour nous permettre d’être à nouveau représentatif au niveau de la scène internationale, pour nos petites catégories. Avant 2011, -car on n’obtient pas un résultat de façon spontanée-, il y a eu Trinidad et Tobago (Coupe du monde cadet 2001) où nos enfants étaient 3es au niveau du championnat mondial. C’est parti un peu de ça. L’essentiel, c’est le travail au niveau des centres de formation. Aujourd’hui, il y a beaucoup de centres de formation qui se battent pour former des  jeunes et je m’en réjouis. Je suis convaincu qu’à brève échéance, vous allez voir des équipes de petites catégories compétitives. Quand vous avez parlé de l’encadrement, cela n’est pas exclu. Nous sommes en train de faire le point au niveau de la Direction technique nationale pour voir ce qu’il faut faire, parce que, effectivement, si l’on se tourne vers les différents centres de formation qui existent dans notre pays, l’on peut sortir des jeunes talentueux qui peuvent permettre au Burkina Faso d’avoir de bons résultats. Tout est en train d’être remis à plat pour, dès l’année prochaine, faire en sorte que nous ayons une représentation meilleure.

Depuis 1998, le Burkina Faso n’a plus posé de candidature pour l’organisation d’une CAN. Est-ce qu’on y pense du côté de la FBF ? Si oui comment cela se passe-t-il ?

Cette question dépasse le cadre de la Fédération parce que l’organisation d’une CAN exige déjà beaucoup de moyens. Mais, notre ministère de tutelle pense sérieusement à la question. Nous sommes, bien sûr, demandeurs, parce que ce n’est pas seulement pour organiser une grande manifestation sportive continentale dans notre pays. Mais, il faut dire qu’organiser une CAN booste les secteurs d’infrastructures dans un pays. En la matière, je dirais plutôt que nous sommes démunis. Au niveau de Ouagadougou, par exemple,   nous n’avons pratiquement que le stade du 4-Août qui réponde véritablement aux normes internationales. Il y avait le stade municipal de Ouagadougou, mais avec les pilonnes qui se sont effondrés, il n’est plus aux normes. C’est la propriété de la commune de Ouagadougou. Mais, nous sommes en train de négocier avec la FIFA pour pouvoir remettre les pilonnes en place et  refaire des gazons par ci et par là. Donc, nous sommes vraiment désireux que le gouvernement puisse nous accompagner un jour à l’organisation d’une manifestation d’envergure internationale au Burkina. Cela nous permettrait d’avoir plus d’infrastructures et de booster également tout le milieu. Bien sûr, la pratique du football va se retrouver davantage booster. Nous sommes d’accord avec vous que la réflexion soit menée. Notre ministère de tutelle nous a assurés qu’il était là-dessus. Si le ministère de tutelle prend le dossier à bras et corps, il faudrait réussir à convaincre les autres membres du gouvernement de l’importance de cette action pour le Burkina Faso. Mais, nous savons qu’au Burkina Faso, tous les secteurs semblent prioritaires. Ce n’est pas du fatalisme, mais nous observons en souhaitant vivement que cela puisse se réaliser d’ici là.

Il y a quelques jours, le joueur camerounais, Albert Ebossé est mort après avoir reçu un projectile en plein crâne lors d’un match du championnat algérien. Un commentaire.

Comme je vous le disais tout à l’heure, à propos de notre élimination du mondial, ce sont des conditions qui étaient toujours difficilement acceptables. Parce que quand nous sommes allés en Algérie, nous avions toujours attiré l’attention des gens. Nous avions dit que, bien qu’ayant été battu sur le terrain, nous avions eu des difficultés. Vous avez vu que le car qui transportait notre équipe nationale a vu une des vitres recevoir un projectile. C’est dangereux. Le football, ce n’est pas la guerre. Il faut prendre toutes les mesures pour éradiquer, à jamais, le fléau du  hooliganisme sur nos stades. Le football, c’est la passion. C’est l’exemple algérien, mais  ce n’est pas propre à l’Algérie. Même sur nos stades ici, nous avons vu souvent  qu’au cours des championnats passés, on a dû suspendre des terrains, voire des dirigeants pour prévenir ce genre de situations regrettables. C’est malheureux, mais en toute chose, il faut souvent tirer le meilleur parti. Je pense que cela doit interpeller les hooligans d’ici et d’ailleurs à plus de discipline sur les terrains pour ne pas connaitre ce genre de débordements malheureux. Il faut résolument que les supporteurs comprennent que lorsqu’ils viennent sur un terrain, ils souhaitent que leur équipe gagne. Mais, ce n’est pas toutes les fois que leur équipe va malheureusement gagner. Mais, ce n’est pas parce que l’équipe qu’on supporte n’a pas gagné qu’il faut trouver des boucs émissaires et se mettre à adopter des comportements extra- sportifs. Donc,  il faut résolument que l’on cultive l’esprit du fair-play sur nos différents terrains.

Pour l’Algérie, encore une fois, c’est un événement très malheureux. Je ne peux que présenter mes condoléances à la famille du joueur en question, ensuite à la grande famille du  football. Le football n’a pas besoin de ce genre d’événements malheureux. Notre président de confédération, le président Issa Hayatou, a exigé des sanctions exemplaires, à la hauteur du forfait qui a été commis. Nous espérons, effectivement, que ces sanctions vont tomber pour dissuader, je l’espère, les auteurs de ce comportement d’un autre âge.

Justement ce comportement hostile n’a-t-il pas joué sur la performance des Etalons los du barrage retour ?

A l’époque, nous avions dit que le Burkina ne proteste pas pour protester, mais pour l’avenir. A l’époque, nous avions dit qu’il fallait qu’on remette les choses dans leur contexte, que le football reste un jeu. Nous aurions souhaité applaudir sincèrement les Algériens, non seulement parce qu’ils nous ont battus, mais aussi parce qu’ils allaient représenter le continent africain à cette grande fête  du football mondial. Et du reste, nous l’avons fait. Nous avons écrit à toutes les 5 équipes qualifiées au mondial pour les féliciter. Mais, nous disons que les conditions d’hostilité n’étaient pas faciles pour les joueurs. Je me souviens très bien du docteur Goossens qui est du staff médical de notre équipe nationale. Il est allé vivement interpeller, à l’époque, le commissaire du match et le quatrième arbitre, pour leur dire  que les supporters étaient en train de mettre du laser dans les yeux du gardien  Diakité et que ça allait l’aveugler. Ça n’a pas été suivi. Mais au mondial, les supporters algériens ont été sanctionnés par la FIFA pour avoir mis ce même laser dans les yeux du gardien russe.

Nous disons que ce ne sont pas des comportements acceptables. Peut-être que si, à l’époque, on avait écouté le Burkina, ça allait réduire ce genre de chose. Je ne peux pas me réduire d’une situation morbide. Mais, il faut que nous tous fassions l’effort de respecter l’esprit du jeu. Et que nous fassions, en tant que responsables, l’effort de bannir les hooligans de tous les bords, qu’on ne donne pas une lueur d’espoir à ces gens. Par notre comportement simplement passif on peut encourager les hooligans.

C’est la seule voie pour que le football reste un jeu propre, un jeu pour lequel des millions, voire des milliards d’êtres humains sur la planète terre se passionnent tous les jours.

Avez-vous quelque chose d’autre à ajouter ?

C’est juste vous dire merci d’être venu à nous et exhorter l’ensemble de la presse sportive du Burkina Faso à accompagner les Etalons comme ils l’ont toujours fait. Elle sera, à n’en point douter, palpitante. Il faut que, ensemble, nous nous donnions la main pour que le Burkina Faso puisse répondre présent au rendez-vous de Maroc 2015, et affronter les autres échéances qui ne vont pas manquer de ce présenter.

Interview réalisée par Philippe Bouélé BATIONO

 

 

 

 

 



28/08/2014
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