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2001, Une année pleine de leçons

L’affaire Justin Zongo en février 2011 et les manifestations d’élèves et étudiants qui en ont découlé, les mutineries de la soldatesque entre mars et juin, l’appel  à la démission du chef de l’Etat par le chef de file de l’opposition politique, la nécessité d’opérer des réformes politiques. Ce sont là, les moments forts de la vie politique burkinabè durant l’année 2011. Tout net, il faut le dire,  l’année 2011 a été, à l’instar du monde entier, jalonné au Burkina par des crises ayant pris souvent des allures dramatiques.

 

Pourtant, tout portait à croire que l’année 2011 était celle des grands chantiers de développement. Puisqu’elle commençait sous le signe de l’émergence. Thème du programme quinquennal du président Blaise Compaoré qui venait de commencer son mandat présidentiel. Mais très vite, la désillusion sera totale pour tous ces chantres de l’émergence. Et pour cause, à partir du 20 février, date de décès de l’élève Justin Zongo des suites de bavures policières, un mouvement scolaire et estudiantin embrase tout le pays. C’est le début d’une crise nationale.

 

L’affaire Justin Zongo : la petite crise avant la grande

Koudougou, ville située à 100 km à l’Ouest de Ouagadougou,  a été le point de départ de la crise que nous avons connue en 2011. L’affaire Justin Zongo,  que certains ont qualifié de fait banal,  sera par la suite une affaire d’Etat. Alors que les services du Centre hospitalier régional de Koudougou déclaraient que Justin Zongo,  élève en classe de 3e, est décédé de méningite,  les élèves eux, étaient convaincus  que leur camarde est décédé des suite de traitements inhumains que la police de Koudougou lui a infligés. D’où, un mouvement d’élèves et étudiants exigeant  justice pour leur Justin. A Koudougou, le mouvement prend une allure inquiétante. On assistera à une bataille rangée entre élèves et policiers entrainant de nombreux blessés et au moins une dizaine de morts, des saccages de biens publics et privés. Au-delà de Koudougou, les manifestations violentes  gagnent les autres localités du pays. Le pouvoir est au pays du mur. Impossible de ramener le calme face à la ténacité des manifestants de poursuivre la lutte. Surtout que ces derniers sont écœurés d’entendre que leur camarade est décédé des suites de méningite, tel que l’a affirmé les services de santé. Des autorités régionales dont le gouverneur du Centre-ouest sera limogé.  Alors que cette crise était loin de connaitre son dénouement final, une autre non moins importante nait : les mutineries des soldats.

 

La crise dans les casernes : l’autorité de l’Etat mise à rude épreuve

C’est le camp général Sangoulé Lamizana à Ouagadougou qui donne le top de départ d’une série de mutineries à travers le pays : C’était dans la nuit du  21 au 22  mars 2011. Manu militari, les Ouagavillois, peu habitués aux crépitements des armes, rentrent chez eux, en attendant de savoir sur les raisons d’une telle soldatesque. C’est une affaire de fesse, nous a-t-on fourni comme explication le lendemain.  En effet, les militaires exigeaient la libération de cinq de leurs qui avaient été condamnés pour avoir déshabillé un jeune homme et le contraindre à traverser la ville de Ouagadougou dans sa tenue d’Adam et Eve. Ce dernier aurait fait la cour à la femme d’un militaire. Face à la barbarie militaire, la justice tremble et libère les cinq militaires. Erreur pour cette dernière qui vient une fois de plus de ternir son image en démontrant qu’il existe dans ce pays des citoyens au dessus des autres. Mais qu’à cela ne tienne, la libération des cinq militaires condamnés pour fait d’outrage public à la pudeur, vol, complicité résoudra-t-il le problème ? Que non ! La crise prendra une autre dimension encore  plus grande. Ce n’est donc pas une simple affaire de mœurs. 

 

Tertius et son équipe emportés par la crise

Alors que dans la soirée du 14 avril 2011, rien ne présageait quelques troubles dans le pays,  les  soldats sortent pour une deuxième fois, en moins d’un mois, rappelons-le. Une sortie lourde de conséquence : viols, saccages, pillages, vols. Et ce sont les commerçants qui payent le lourd tribut. Le lendemain 15 avril, ces derniers (les commerçants) sortent dans la matinée et s’attaquent violemment aux édifices publics et privés. Le siège du parti majoritaire, le CDP,  sera saccagé.  Cette sortie sera fatale au gouvernement Tertius IV qui  est dissout le 16 avril 2011. Serait-il donc la faute du gouvernement ?  Non ! Car, bien avant cette date, le président du Faso,  lors d’une rencontre avec les représentants des mutins affirmait que « la crise était terminée ». Ni cette phrase, ni la dissolution du gouvernement, ni les couvre-feux,  encore moins le changement intervenu à la tête de la hiérarchie militaire n’a convaincu les militaires. Pire, la grogne atteint toutes les casernes du pays. Dori, Tenkodogo, Fada N’Gourma, Gorom-Gorom, Dédougou, pour ne citer que ces localités,  ont pris le virus de la soldatesque.  Même les éléments du Régiment de sécurité présidentielle, reconnus pour leur fidélité au président, ne tarderont pas à entrer dans la danse. N’est-ce pas eux qui ont contraint le président du Faso à quitter son palais pour un refuge à Ziniaré, sa ville natale ?   

 

Un régime aux abois

La dissolution du gouvernement, sensée être le palliatif à la crise n’en a rien été. Et, ce malgré la batterie de mesures qu’a prises le nouveau Premier ministre, Luc Adolphe Tiao, appelé à la tête du gouvernement le 18 avril dernier.  Le régime de Blaise Compaoré est aux abois. Dans la foulée, le chef de file de l’opposition politique appelle le chef de l’Etat, Blaise Compaoré, à démissionner. Un appel d’une opposition qui a eu peu d’adeptes. Il n’en demeure cependant pas moins que le régime était au bord du gouffre. Disons que l’autorité de l’Etat était inexistante : des personnalités politiques et administratives sont physiquement attaquées par les mutins. Les populations sont obligées de se terrer chez elles. Les étrangers sont violés dans leurs chambres d’hôtel. L’image du pays est sérieusement écorchée. La situation devenait de plus en plus insoutenable. Difficile pour les observateurs et les analystes de circonscrire la crise dans un angle, tant chaque jour avec sa situation nouvelle. Blaise Compaoré, précédemment élu avec plus de 80% multiplie, contrairement à ses habitudes, les déclarations dans la presse d’Etat. Le nouveau gouvernement est sans repère car, malgré les mesures d’apaisement, les frondeurs tiennent mordicus.  Dans la nuit du 1er au 2 juin 2011, une mutinerie violente se déclenche à Bobo. C’était l’horreur quand on sait que les mutins passaient de maison en maison pour se livrer aux vols, pillages et viols. La population n’en pouvait plus tant le tort était grand. Les militaires ont perdu l’objectif de leurs revendications, donnant une raison suffisante au gouvernement de sévir. Le 3 juin 2011, un commando composé des militaires du Régiment parachutiste commando de Dédougou et du régiment de sécurité présidentielle encerclent les mutins à Bobo. C’est la fin de la crise et plusieurs militaires seront arrêtés dans la ville de Sya. Plus jamais ça, a affirmé le porte-parole du gouvernement, Alain Edouard Ouédraogo à l’issue de l’expédition punitive de Bobo. Quelques jours après, au moins 600 militaires sont radiés des rangs de l’armée.  L’accalmie revient surtout qu’au moins d’Août,  l’affaire Justin Zongo connaitra aussi son épilogue avec la condamnation de trois policiers jugés coupables du décès de l’élève Justin Zongo, élève de Koudougou, épicentre de la crise.  Dans la foulée,  les réformes politiques avaient aussi commencé. 

 

Les réformes politiques : un rendez-vous du peuple avec lui-même

C’était une promesse du chef de l’Etat depuis le 10 décembre 2009 à Ouahigouya lors de la commémoration de l’anniversaire de l’indépendance du pays. En effet, Blaise Compaoré « invitait les citoyens à approfondir les réflexions sur les réformes politiques indispensables à l’enracinement dans notre société des valeurs de démocratie et de citoyenneté responsable ».  Pour la circonstance, un ministère chargé des réformes a été crée et dirigé par le docteur Arsène Bongnessan Yé. D’aucuns avaient vite fait de qualifier, ce dernier de ministre de l’article 37. Eh bien, vous l’aurez compris, l’année 2011 a été aussi marquée sur le plan du débat politique, par cette question de modification de l’article 37 de la Constitution. Si fait que dans le processus des réformes, certains pensaient que le seul objectif était de sauter le verrou limitatif du mandat présidentiel.  Le Conseil consultatif sur les réformes politiques (CCRP) qui a débuté  ses assises en juin 2011, avec la tenue de la première session, reverse l’article 37 dans les points non consensuels. Au delà de l’article 37, les conseillers se sont accordés sur bien  de points, somme toute,  essentiels pour insuffler un nouveau dynamisme à la gouvernance.  Lesquels points ont été débattus dans les régions et lors des assises nationales. Le couronnement de toutes les activités a été la cérémonie de clôture des assises nationales qui a connu la présence du Grand sachem, qui au sortir de cette instance, a promis de mettre en œuvre les propositions consensuelles, avant de déclarer : «en ce qui me concerne  je suis là jusqu’en 2015 ». En attendant, il va falloir gérer l’année 2012 qui, sans doute, est pleine de joutes politiques.

 

Par Yaya Issouf MIDJA



31/12/2011
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